Un quart des liquidations d’entreprises françaises proviennent du défaut de paiement des acheteurs (ou des clients). L’exportateur cherche donc à mesurer ce risque, appelé « risque crédit», afin de s’en prémunir par la mise en place de solutions adaptées.
L’évaluation du risque crédit
1. Les formes du risque crédit
a) Le risque commercial
Il s’agit du risque lié au non-paiement par l’entreprise importatrice de la somme due, qui peut s’expliquer par son incapacité financière à faire face à ses engagements (situation d’insolvabilité) ou par sa volonté de ne pas honorer ses dettes (comportement de mauvais payeur).
b) Le risque politique
Le non-paiement peut être lié à la situation du pays de l’acheteur empêchant la réalisation des transferts de devises vers le pays de l’exportateur. Ce risque dépend donc de l’instabilité politique du pays (pouvant entraîner guerres, émeutes ou révolutions), des décisions des autorités publiques et des risques de catastrophes naturelles.
c) Le risque bancaire
Il est lié aux défaillances de la banque de l’acheteur qui ne peut assurer
auprès de l’exportateur le règlement de la somme due.
2. La mesure du niveau de risque
L’évaluation du niveau de risque encouru est primordiale pour l’entreprise exportatrice. En effet, une mauvaise appréciation de ce risque peut mettre en cause son équilibre financier et sa pérennité. La mesure du niveau de risque se fait selon différents critères.
a) La répartition du chiffre d’affaires
L’analyse de la répartition du chiffre d’affaires selon les clients ou les pays donne une première information sur le niveau du risque crédit. Ainsi, si l’analyse montre une concentration du chiffre d’affaires sur un nombre réduit de clients ou de pays dont le risque politique est élevé, alors le risque crédit est important. À l’inverse, une dispersion du chiffre d’affaires réduit le risque crédit, même si elle entraîne une gestion de facturation plus importante. Pour mener à bien cette étude, différentes techniques sont utilisées par les entreprises, dont la loi de Pareto (ou loi des 20/80), qui consiste à regrouper les clients les plus importants de l’entreprise exportatrice et à mesurer leur contribution à son chiffre d’affaires global.
b) Les caractéristiques des clients (ou acheteurs)
Trois éléments sont à étudier :
Le statut de l’acheteur : alors que l’acheteur public (administration ou entreprise publique) présente uniquement un risque politique, il en va différemment avec un acheteur privé (entreprise), pour qui l’exportateur
devra prendre en compte à la fois un risque commercial et un risque politique.
L’ancienneté des relations établies avec le client : elle permet de connaitre son comportement en matière de paiement, même si l’exportateur doit mettre régulièrement à jour les informations le concernant. À l’inverse, si la relation est récente, le risque est plus important faute de connaissance
sur son comportement de paiement.
Le pays de l’acheteur : pour apprécier ce risque, l’exportateur peut s’aider du système de notation des pays. La Coface note les pays à partir de l’étude d’une série d’indicateurs portant sur les aspects macro- et micro- économiques du pays. Les notes attribuées définissent le niveau de risque du pays : 7 notes sont possibles (A1 – A2 – A3 – A4 – B – C – D), allant du risque le plus faible au risque le plus élevé. Ces informations sont accessibles sur le site www.cofacerating.fr. Une autre société, Ducroire, propose, sur le site www.ducroire.be, une évaluation de pays en distinguant le risque politique et le risque commercial.
c) L’échéance de paiement
Plus cette échéance est éloignée, plus le risque de changement de situation de l’acheteur ou du pays augmente, entraînant une élévation du niveau du risque crédit.
La gestion du risque crédit
1. Les techniques de prévention du risque
Elles consistent essentiellement en la collecte d’informations sur le client et son pays. Ces informations aident l’entreprise exportatrice à prendre un certain nombre de décisions, comme contracter ou non avec un client, adapter son offre commerciale en exigeant un paiement d’avance (total ou partiel) ou mettre en place de techniques de couverture.
Les partenaires de l’entreprise (les agents, les filiales, les clubs d’exportateurs ou les banques à travers leur réseau dans le monde), les sociétés spécialisées dans l’assurance crédit (Coface, Ducroire, Euler-Hermes…), le dispositif public et parapublic français (Ubifrance, les CCI…), mais aussi le fichier clients de l’exportateur constituent des sources utiles.
2. Les techniques de couverture bancaire
Elles couvrent le risque crédit à différents niveaux.

3. L’affacturage export ou factoring
L’exportateur transfère la gestion de ses créances à une société spécialisée, appelée « factor« , qui se charge d’en assurer l’encaissement à l’échéance prévue et d’en garantir le paiement après de l’exportateur en cas de défaillance de l’acheteur.
a) La gestion des créances
Le factor se charge du recouvrement des créances auprès des importateurs ainsi que du déclenchement des relances en cas de retard de paiement. L’exportateur perçoit le montant des créances à l’échéance prévue, non
pas de l’importateur, mais directement du factor.
b) Une garantie de paiement
L’affacturage offre à l’exportateur une couverture contre le risque de non-paiement. Mais cette garantie est assortie d’un certain nombre de conditions. Le contrat d’affacturage est en effet un contrat global : l’exportateur est dans ‘obligation de céder l’ensemble des créances exports au factor et non uniquement les créances qui lui paraîtraient douteuses. Toute créance émanant d’un nouveau client nécessite l’agrément du factor, qui peut en refuser la gestion. De plus, la garantie de paiement est limitée à un montant maximal appelé « encours ».
c) Les autres prestations possibles
Le factor peut avancer le montant des créances et prendre également en charge le risque de change pour les factures émises en devises étrangères.
d) L’utilisation de l’affacturage
Même si son coût reste élevé au regard d’autres solutions, l’affacturage connaît un succès croissant ces dernières années, lié à la diversité des services qu’il offre et à sa souplesse. Le contrat d’affacturage est en effet un contrat modulaire qui permet à l’exportateur d’opter pour les prestations dont il a besoin, en limitant ainsi le coût.
4. L’assurance crédit
L’entreprise exportatrice souscrit un contrat d’assurance crédit auprès d’une compagnie qui s’engage à l’indemniser en cas de défaillance du débiteur. Comme pour l’affacturage, l’assurance crédit est donc une solution
où le risque crédit est transféré après d’un tiers, mais elle s’en différencie par le fait que l’assureur n’intervient qu’en cas d’incident de paiement.
a) La mise en place de la garantie
Un certain nombre de points sont définis lors de la signature de la police d’assurance :

b) L’entrée en garantie (dans le cadre de la police globale)
À compter de la signature du contrat d’assurance, toute nouvelle créance est en principe garantie. Une demande d’agrément ou d’option peut néanmoins être nécessaire pour les nouveaux clients de l’exportateur. Son accord donné, l’assureur fixe ensuite un découvert autorisé (ou montant garanti), qui consiste en la fixation d’un montant maximum de créances couvertes avec ce client.
c) La mise en jeu de la garantie
Elle intervient en cas de non-paiement de l’exportateur à échéance et suit une procédure précise. Établie par l’exportateur dans les jours qui suivent
l’échéance, la DMS (déclaration de menace de sinistre) informe l’assureur de la défaillance de l’acheteur. L’établissement de la DI (demande d’intervention), toujours par l’exportateur, permet ensuite à l’assureur d’entamer des démarches auprès de l’importateur afin de recouvrer la créance. À compter de l’établissement de la DI, un délai de carence ou délai constitutif de sinistre (variable selon les polices et la nature
des risques) s’écoule avant le versement de l’indemnité, qui a lieu dans les 30 jours qui suit l’expiration de ce délai.
Exemple : la société Dessein reçoit le 2 mars une commande d’un client allemand d’une valeur de 12 000 €. Son assureur lui accorde un découvert de 10 000 €. À l’échéance (le 31 juillet), l’acheteur allemand se révèle défaillant. Une déclaration de menace de sinistre puis une demande d’intervention sont établies par la société Dessein, respectivement les 25 septembre et 25 octobre. Le contrat précise que la quotité garantie pour le risque commercial est de 90%, le délai de carence est de 5 mois. Le montant de l’indemnité reçue est de : 10000 x 90/100 = 9000 €. Son versement aura lieu au cours du mois d’avril de l’année suivante.
d) Les récupérations éventuelles
Si l’assureur obtient du débiteur défaillant tout ou partie du montant de la créance impayée, une régularisation peut intervenir auprès de l’assuré. Deux situations sont à distinguer :
- Si le montant récupéré est inférieur à l’indemnité versée, l’assureur conserve la totalité de la somme obtenue.
- Si le montant de la créance récupérée est supérieur à l’indemnité
versée, l’assureur reverse le solde (solde = montant obtenu – indemnité – frais liés à la récupération de la créance).